La décriminalisation et la légalisation du cannabis au Canada devrait constituer une préoccupation pour les parents d’adolescents et les jeunes adultes. Le cannabis, au même titre que l’alcool, n’est pas une substance bénigne et il est important de reconnaître que la légalisation du cannabis ne signifie pas qu’il est sécuritaire pour tous ceux qui en consomment, en particulier les adolescents dont le cerveau n’est pas encore complètement développé.
Le cerveau d’un adolescent est en fait assez vulnérable. Récemment, la Société canadienne de pédiatrie a expliqué, dans un document de principes intitulé « Le cannabis et les enfants et adolescents canadiens », les risques auxquels les jeunes s’exposent lorsqu’ils consomment régulièrement du cannabis. La principale auteure du document, la Dre Christina Grant, spécialiste de la médecine de l’adolescence du département de pédiatrie de l’université McMaster, insiste sur le fait que « les jeunes ne devraient pas consommer du cannabis à des fins récréatives car il peut produire de nombreux effets secondaires potentiellement graves ».
La terminologie de la marijuana
Tout d’abord, quelques définitions sont nécessaires afin de bien comprendre les préoccupations. Le terme « cannabis » désigne les éléments psychoactifs d’une plante appelée Cannabis sativa, c’est-à-dire les feuilles séchées et broyées et les bourgeons (marijuana), la résine ou la substance solide collante des bourgeons (hachisch), ainsi que les huiles et la cire (extraits de cannabis). Le cannabis peut ainsi être inhalé ou ingéré, dépendamment de la forme sous laquelle il se trouve. Pour la santé des adolescents, la principale préoccupation est le THC, un composant du cannabis qui donne la sensation de « planer ».
Les risques de santé associés au THC
Ce produit chimique cause des perturbations mesurables dans le développement du cerveau des adolescents pouvant mener à des déficits durables. Spécifiquement, le THC provoque des changements toxiques aux neurones, des cellules du cerveau. En utilisant des images de résonnances magnétiques, certaines études scientifiques ont documenté des indications de changements structuraux au niveau du cerveau d’adolescents consommateurs de cannabis. Ces études démontrent, entre autres, un volume cérébral plus faible et un amincissement du cortex, la couche externe du cerveau.
La consommation régulière et les effets à long terme
Ce qui est encore plus alarmant est ce que nous voyons en pratique clinique chez les adolescents qui consomment régulièrement du cannabis. Un sur six développe un problème de dépendance appelé «trouble d’utilisation du cannabis », qui peut affecter la capacité d’une personne à fonctionner au quotidien, entraînant une baisse des résultats scolaires et l’apparition de conflits avec la famille et les amis. Également, une association existe entre le cannabis et la dépression, ainsi que les troubles anxieux.
Certaines études indiquent qu’il pourrait exister un lien de causalité entre le cannabis et l’apparition de troubles psychotiques, particulièrement les consommateurs ayant des antécédents familiaux de psychoses. Une préoccupation majeure est l’association entre le cannabis et les troubles psychotiques, tels que la schizophrénie, un trouble de santé mentale sévère. Dans certains cas, le cannabis peut provoquer des symptômes psychotiques immédiats, tels que des hallucinations et la paranoïa, ce qui démontre son effet puissant sur le cerveau. Chez certaines personnes, ces symptômes psychotiques peuvent persister plusieurs jours après la consommation de cannabis et chez d’autres, les symptômes ne disparaissent jamais.
En tant que médecins urgentistes, mes collègues et moi-même constatons également une augmentation des cas d’adolescents souffrant du syndrome appelé « hyperémèse cannabinoïde », une condition où la consommation chronique de cannabis provoque des épisodes invalidants de douleurs abdominales et de vomissements, les obligeant souvent à se présenter à l’urgence. Les épisodes disparaissent à l’arrêt de la consommation de cannabis, et ces personnes devront s’abstenir d’en consommer dans l’avenir, au risque de faire réapparaître le syndrome. Une fois de plus, cela indique que le cannabis n’est pas une drogue exempte d’effets secondaires sévères, et nous devons en tenir compte dans notre approche.
Il est important de retenir que les adolescents, étant déjà à risque de développer une dépendance, des troubles de l’humeur ou psychotiques, devraient être sensibilisés au fait que la consommation d’une substance peut accroître ces risques, afin d’en décourager la consommation. Tout de même, la plupart des experts dans ce domaine sont d’avis que les adolescents doivent éviter la consommation régulière de cannabis, idéalement jusqu’à ce que leur cerveau atteigne sa maturité, autour de 24 ans.
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